La
Pointe de Razis, 2575m, n'était pas encore affublée de ce prestigieux patronyme, récemment apparu sur Géoportail, lorsqu'en
avril 2018 nous y sommes montés pour la première fois raquettes aux pieds.
Eh oui ! nous n'avons découvert cette nouvelle appellation qu'à l'occasion de notre deuxième visite, en pédestre, le premier
septembre 2022 et persistons à penser que le terme de
Pointe n'est pas le plus opportun pour désigner un sommet aussi peu individualisé à la forme plus "patatoïdale" que pointue, c'est tellement vrai que les planteurs de la croix n'ont pas jugé pertinent d'en orner le sommet, invisible depuis la vallée, en la décentrant jusqu'à sa discrète antécime Nord-Est, un comble ! Toujours est-il que le point culminant de cette fameuse pointe arbore toujours le très ancien sobre panneau
"Razis 2575" ce qui, dit en passant, n'est guère plus pertinent puisque, à en croire la Top 25 de l'IGN, Razis n'est autre que le mélézin au pied des falaises de la face Nord de cette montagne bien individualisée, d'où les très logiques Cabane de Razis et Crête de Razis qui militent pour la toute simple appellation de
" Sommet de Razis" à coup sûr bien trop modeste et pas suffisamment percutant pour satisfaire les ambitions touristiques de deux prestigieuses stations rivales, d'autant que cette pointe constitue le point culminant visible depuis Risoul 1850.
Après cette longue digression, il est grand temps de revenir à cette randonnée qui n'avait rien à voir avec celle de notre première en cette exceptionnellement longue séquence anticyclonique froide et sèche nous laissant aux prises avec une neige lyophilisée sans aucune cohésion sur les parties ombragées et toutes les pentes Nord et complètement béton quasiment partout ailleurs au point que le BRA affichait un risque d'avalanche à 1 toutes pentes et toutes altitudes confondues sur le Massif du Parpaillon, du jamais vu à notre connaissance, à tel point que, même si ce n'est vraiment pas un exemple à suivre, nous sommes partis les sacs allégés de tout le matériel de sécurité. Ce qui tombait à point nommé vu qu'en ce moment j'éprouve quelques difficultés à suivre l'Ours qui a pourtant lui aussi bien levé le pied depuis quelques temps. Raison pour laquelle dans son
projet il avait fait le choix d'optimiser au mieux l'éternel contradictoire compromis entre la distance minimale et les pentes les plus abordables pour atteindre l'objectif. Mais comme chemin faisant sur la grande rocade de la liaison de la Station Risoul 1850 à Peyrol sur le domaine skiable de Vars, parfaitement damée pour le ski nordique, les chiens de traineaux, raquettistes et autres randonneurs pédestres, je lui renouvelais qu'en fait c'était justement à plat que ma progression était la plus douloureuse, il m'a invitée à rejoindre la Crête de Reyssas au plus court par le premier talweg au Nord-Est de Razis en ajoutant :
- hier soir quand tu nous as prévenus que tu n'étais pas sûre de pouvoir tout faire, j'ai informé la Marmotte que si cet itinéraire était tracé par les skieurs, nous l'emprunterions, donc pas de souci nous y allons !
Bien nous en a pris, grimpette-raccourci fort agréable qui nous a permis d'arriver facilement au pied de la seule difficulté de cet itinéraire à savoir le mur à grimper pour accéder du haut de la Crête de Reyssas à l'épaule Nord-Ouest de la Crête de Razis, avec ses fameux 50 m de dénivelé entre 35 et 40° de pente, relativement facile à passer dans la trace de l'Ours en neige profonde et encore plus vite descendu en
luge-culotte quand on a la chance de ne pas y rencontrer de dangereux obstacles.
Nul besoin d'un dessin pour comprendre qu'il n'en a pas été de même ce jour-là où nous y avons trouvé une pente entièrement "trafollée" par les multiples descentes de skieurs et entièrement dépourvue de trace de montée. Alors, une fois de plus, c'est l'Ours qui a dû s'y coller et s'est appliqué à m'y creuser de confortables marches en forme de baignoire que je me suis appliquée à gravir jusqu'à l'amont des deux rochers entre lesquels j'avais glissé et là, arrivée où l'Ours avait bien marqué sa conversion pour rejoindre au plus court le large talweg du haut, je n'ai plus eu le mental suffisamment fort pour poursuivre :
- Alain, arrête de creuser des marches et continue seul, je fais demi-tour et t'attendrai en bas, je me sens pas de continuer !
Et il m'en a fallu du temps pour assurer mon demi-tour et redescendre du mieux possible dans les marches de montée, avant de venir me caler bien à l'abri derrière le premier gros
mélèze (au centre-droit de cette vue d'avril 2018) où j'avais déjà hésité à venir abandonner mon sac avant de suivre l'Ours qui m'en avait dissuadée sous prétexte qu'en période de vacances scolaires il risquait d'y avoir pas mal de passage par là, on n'est jamais trop prudent !
Toujours est-il que lorsque j'ai vu avec quelle prudence de sioux l'Ours négociait le plus pentu de son retour pour me rejoindre après l'avoir sécurisé le plus longtemps possible en descendant par l'amont du petit bosquet qui surmonte la franche rupture de pente bien plus à gauche que sa trace de montée, je me suis félicitée de ne pas l'avoir totalement suivi.
Alors qu'il cherchait désespérément à nous localiser sur la Crête de Reyssas depuis le haut, à la radio la Marmotte l'avait prévenu qu'elle n'était pas encore arrivée au soleil sur cette crête et bien loin de me rejoindre. Raison pour laquelle, revenu à mon niveau, il m'a invitée à descendre à la rencontre de la Marmotte pour aller pique-niquer sur la pointe cotée 2252 m, véritable belvédère-solarium de cette bien belle crête. Vu la chaleur ambiante et le pénible bottage de nos raquettes sur les parties les plus ensoleillées, d'un commun accord, nous avons décidé de renoncer au retour prévu par l'aval de cette crête et de profiter du mieux possible d'un bien plus agréable retour par son second talweg Nord-Ouest.
De retour sur la piste damée, la Marmotte décidait de déchausser pour revenir au parking pédibus tandis que l'Ours bon prince lui prenait ses raquettes sur son sac et me proposait d'éviter ce trajet assez rébarbatif en profitant de cette neige encore légère à l'ombre pour un itinéraire de retour certes fort original mais quelque peu physique, heureusement que je m'étais bien reposé au pied de mon mélèze et pendant la longue pause-pique-nique.
Résultat : cette randonnée assez atypique, comme bien souvent très différente de son projet, nous a tous satisfaits, bravo à son organisateur qui a une fois de plus fait la preuve de sa bienveillante adaptabilité.